[Par Benson SERIKPA]
[Ci-dessous les propos recueillis par Carole SERIPKA]
Rejetés au paradis, pourrai-t-on résumer, le film documentaire de Roman Vital, qui a ouvert la 12ème édition du Festival International du Film des Droits de l’Homme (FIFDH), le mardi dernier au cinéma le Nouveau Latina, à Paris. Ce film intitulé « Life in paradise », qui passe en avant-première en France, a tenu en haleine le public présent pendant 78 min. Il met en exergue la vie miséreuse des demandeurs d’asile rejetés dans un des centres de déportation que compte la Suisse. Mais aussi, le réalisateur suisse projette le regard que les fonctionnaires qui y travaillent ont de ce centre même et de son fonctionnement. Et il n’occulte pas pour autant l’opinion à la fois hostile et dégradante des habitants de Valzeina, village paradisiaque qui abrite ce centre, sur « ces voisins » que le gouvernement leur impose.
Lors du débat qui a suivi la projection de ce film documentaire (en compétition officielle), Roman Vital a précisé qu’il a travaillé en toute objectivité dans le souci d’inviter les camps politiques (Droite et Gauche) suisses à se pencher sur la politique de l’immigration, notamment sur la question des demandeurs d’asile sur le territoire Suisse.
Bien avant la projection de « Life in paradise », Jonathan Vaudey, Responsable de programmation du FIFDH, a rappelé que cet événement se veut être une plate forme d’expression sur les questions liées aux Droits de l’Homme. Selon lui, toutes les programmations seront suivies de débats avec les différents réalisateurs. Au nom de Vincent Mercier, Délégué général FIFDH Paris, il a remercié tous les partenaires de cette manifestation qui accueille pour la première fois l’UNHCR.
Pour sa part, Bernard Schricke, Directeur Action et plaidoyer France Europe, Secours Catholique, Caritas France, s’est dit heureux de soutenir une fois de plus cette initiative de l’association Alliance Ciné. Il a notamment encouragé le public à avoir également un grand intérêt pour l’exposition photo intitulée « Les oubliés de nos campagnes », qui se tient à la faveur de cette 12ème édition du FIFDH. Une belle soirée, qui en annonce encore de plus belles, jusqu’au 18 mars prochain, pour les mordus du 7ème Art qui, veulent bien entendu joindre l’utile à l’agréable.
[Propos recueillis par Carole Sérikpa]
Freddy Djerra (Dessinateur de presse) : « Plus informatif qu’engagé…»
« Le film partait dans tous les sens. C’est bien de prendre une position à savoir, être neutre. Mais pour moi, on ne peut traiter ces sujets, notamment ceux des Droits de l’Homme sans être engagé. On ne peut pas faire ce genre de film documentaire et dire qu’on laisse les gens se faire leur propre idée. Je crois que son film est plus informatif qu’engagé et c’est vraiment désolant».
Laurène Lepeytre (Réalisatrice) : «C’est partial »
«J’ai été choquée par ce film, parce que le réalisateur dit être neutre. Pour moi, il n’est pas neutre parce qu’il épouse le point de vue des habitants. Qui, sont très peu en empathie avec ces demandeurs d’asile. J’ai l’impression que le réalisateur n’a pas réussi à créer cette proximité entre les habitants et ces demandeurs d’asile. Les paroles des habitants sont tellement choquantes et on n’a pas de contrepoints pour contre-balancer le poids de leurs propos. Et c’est ce qui me gène. Du coup, pour moi ce film est partial ».
Gérard Valadier (Animateur au Secours Catholique) : « Un regard froid »
«Ce film est une occasion de se poser des questions sur le regard que nous portons sur les hommes quel que soit leur situation. Dans les commentaires des habitants de ce village, nous pouvons penser que c’est un regard froid. Mais en même temps, c’est le regard que porte certaines personnes sur les demandeurs d’asile. C’est donc l’occasion de s’interroger, est-ce le seul regard que je veux porter sur les gens ? Ou, est-ce que je veux aller plus loin? C’est un pas de plus sur la compréhension de la situation. Le plus important c’est de le montrer aux personnes qui ne sont pas encore convaincues, pour qu’elles voient l’aspect plus humain de la chose ».