[Par Armand IRÉ]
A Abidjan capitale économique ivoirienne un phénomène inquiétant prend de l’ampleur : celui du rapt et assassinats d’enfants. En pleine année électorale dans ce pays qui peine à retrouver une cohésion sociale, s’installe une psychose et les interrogations se multiplient. Lucarne sur une situation en passe de devenir un fléau.
Mareau Bénitier n’avait que 5 ans. Sorti à quelques mètres de la maison paternelle pour s’acheter son goûter du jour, il n’est plus jamais rentré. Son frêle corps a été retrouvé une semaine plus tard au bord de la lagune à la base navale de Locodjro dans la commune d’Attécoubé au nord d’Abidjan, avec un pied et la tête emportée. Il est le visage médiatisé de la douleur de plusieurs familles ivoiriennes. En moins d’un mois 25 enfants ont été selon la version officielle, kidnappés et tués ou dans le « meilleur » des cas, portés disparus. A Abidjan en cette année électorale, la psychose qui ne s’est d’ailleurs pas vraiment éloignée, ressurgit de plus belle et la population de ce pays de l’Afrique de l’ouest, ensanglanté par une guerre politico-militaire et une crise postélectorale tout aussi meurtrière ne sait vraiment à quel saint se vouer désormais face à ce qu’une ivoirienne a qualifié de « nouvelle plaie pour la nation ivoirienne ».
Des crimes qualifiés de rituels, les « brouteurs » et la propagande politique
Les étranges mutilations observées sur le corps des victimes font penser à des crimes rituels. Le petit Mareau Bénitier aux dires de sa mère Nina-Olywann Guinan a été enlevé par un jeune de leur quartier selon un témoin. Ce jeune selon les infos fournies par la mère endeuillée devant les caméras de la télévision ivoirienne au cours d’une émission grand public de grande écoute, ferait parti « d’un groupe de brouteurs et qu’il ne serait pas à son premier forfait ». Les brouteurs ce sont ces jeunes gens qui écument les cyber-cafés ivoiriens ou qui connectés depuis leurs domiciles ciblent des pigeons sur le net et arnaquent des naïfs à tour de bras avec à la clef des sommes faramineuses. Le phénomène s’est amplifié au point qu’une brigade policière chargée de lutter contre ce mal a vu le jour depuis des années à Abidjan. Le désarroi est à son paroxysme. Les familles victimes et les ivoiriens ont été empêchés par les autorités ivoiriennes de manifester alors que ces mêmes autorités et l’opposition ivoirienne ont manifesté main dans la main devant l’ambassade de France à Abidjan lors des attentats contre Charlie Hebdo ! Pis seulement 1 million de CfA soit environ 1500 euros ont été remis à chaque famille de victime.
Hamed Bakayoko le ministre de l’intérieur ivoirien tout en affirmant qu’il prenait des mesures pour lutter contre ce phénomène y a ajouté sa touche politicienne en affirmant que « les jaloux veulent ternir l’image du pays ». Son patron à savoir le chef de l’état ivoirien Allassane Dramane Ouattara qui face à l’ampleur de la situation a écourté son séjour d’Addis-Abeba ou il participait au sommet de l’Union Africaine (UA), n’a trouvé de mieux à faire que d’accuser les réseaux sociaux. Pour lui cette situation a été « amplifiée par les réseaux sociaux ».
Au moment ou nous écrivons ces lignes la commune balnéaire de Port-Bouet au nord d’Abidjan la mégapole ivoirienne est fermée au reste du pays pour cause de manifestation de la population qui voulait coûte que coûte se faire justice après la découverte de restes d’enfants dans le sac d’un individu pratiquant de sciènes occultes. La police du quartier n’a pu venir à bout de la détermination de la population et s’en est tiré avec trois officiers blessés. Il a fallu la rescousse de la CRS et des éléments du centre de commandement et d’opérations-CCDO- pour qu’un calme précaire revienne. « L’heure est grave » comme on le dit à Abidjan et les populations n’accusent plus seulement les brouteurs mais tournent aussi leur regard accusateur du coté des politiciens en cette année électorale car un silence inexpliqué entoure le sort des quelques coupables aux mains de la police.
La principale organisation mondiale de défense des droits de l’enfant, l’UNICEF est préoccupée par la situation et sa représentation d’Abidjan s’est fendu d’un communiqué sans équivoque :« L’UNICEF est profondément préoccupé par les enlèvements d’enfants et les corps mutilés retrouvés, » a déclaré Adèle Khudr, Représentante de l’UNICEF en Côte d’Ivoire. « Ces actes sont inacceptables, constituent des violations graves de droits de l’enfant, et les autorités ivoiriennes doivent tout mettre en œuvre pour retrouver rapidement les individus qui ont commis ces crimes pour qu’ils soient traduits en justice. »
A Abidjan plusieurs parents on retiré leurs enfants des écoles.