[Par Marie-Angélique INGABIRE]
« L’histoire se raconte elle-même. Il n’y a rien de fixe à comprendre, les images parlent d’elles-mêmes », raconte Alexis Berg, jeune français dont la collaboration avec Michel Le Meur a permis la réalisation du film-fiction « Radél ».
Tournée dans une ancienne école d’apprentissage maritime d’Audierne dont les portes ont été ouvertes en 1964 et refermées en 1995, Radél n’a aucune narration ni mot de la part de l’acteur. Malgré l’abandon du bâtiment, un homme, qui, d’après Alexis Berg pourrait être un naufragé, un ancien élève ou un marin, y passe sa vie quotidienne qui n’est pas trop différente de celle des autres. Le vent a cassé les vitres et la pluie et le temps ont dégradé l’école. L’acteur y fait du sport, mange, prend sa douche, se couche, fait le ménage, aime…
L’acteur est inséparable du lieu de tournage car c’est la même personne qui a vu le lieu qui a décidé d’y faire un film. Au cours de leurs vacances dans la région, Berg et le Meur l’ont tourné et ne l’ont jamais considéré comme un produit fini. D’abord, pour Berg un produit c’est quelque chose qui n’est pas hors du marché, ensuite ils l’ont toujours regardé, visionné, modifié.
Ce film-fiction a été produit dans la région de Bretagne et son histoire peut se raconter de plusieurs manières, car « il n’utilise pas le langage et le sort d’un dispositif habituel : pas de scénario, pas de rôle, ni de métier ni de spécialisation […], ». Ce réalisateur précise que le fait de ne pas y inclure des paroles ne dit pas forcément qu’il n’y a pas de langage. D’après lui, dans ce monde qui devient de plus en plus bruyant, trop de bruit risque d’entrainer la carence en écoute. Radél cadre avec le Festival de Douarnenez dont des présentations sont normalement faites dans différentes langues, dont le français, l’espagnol, la Langue des Signes Françaises (LSF) et la version sourds et malentendants : toute personne s’y retrouve facilement, pas besoin d’interprète ni de sous-titrage, le langage du film se suffit et ne limite pas l’histoire.
La proximité entre Audierne et Douarnenez (22km) fait de ce festival une opportunité de diffuser Radél « dans le coin ». Selon Berg, l’un de ses réalisateurs, ils ont la malchance de vivre dans une époque qui ne convient pas, avec le monde de la culture qui reste enfermé ou bouclé, mais ils espèrent trouver en Douarnenez 2015 un lieu ouvert aux artistes et ainsi à l’expression des acteurs du domaine culturel. Premièrement, ce festival leur a été facilement accessible, deuxièmement il ne se penche pas trop vers le concept de la « marchandise », comparativement au reste de l’industrie aussi morbide qu’est le cinéma.
Les 2 réalisateurs qui à la base ne sont pas des professionnels du cinéma sont pourtant satisfait d’avoir pu faire Radél dont la réalisation sans budget ne leur a pas couté cher. Déjà présenté Radél dans un bar à leurs invités, et ils sont ravis de participer au festival de cinéma de Douarnenez 2015 où sa diffusion est prévue pour ce lundi 24 aout à 21h.