Ce lundi 9 octobre au Théâtre du Châtelet, les anciens journalistes du Journal du Dimanche se sont réunis en collectif et ont organisé la « Nuit de l’indépendance pour une presse libre » après l’arrivée de Geoffroy Lejeune à la tête de l’hebdomadaire.
Il y avait foule ce lundi 9 octobre à l’entrée du Théâtre du Châtelet, dans le 1ᵉʳ arrondissement de Paris à 20h30. Et pour cause : les anciens journalistes du JDD étaient à l’honneur. Après une grève de 40 jours pour défendre leur indépendance suite à l’arrivée de Geoffroy Lejeune, ancien de Valeurs Actuelles les « ex » du Journal du Dimanche se sont regroupés pour proposer la « Nuit de l’indépendance pour une presse libre ». Au programme de ces plus de deux heures de spectacle engagé : des prestations entre autre de Flavien Berger, Lison Daniel, Sara Forever, des apparitions d’humoristes tels que Nicole Ferroni, Guillaume Meurice ou encore François Morel, mais aussi des débats avec des politiques de tous bords, animés par Julia Cagé et le streameur Jean Massiet.
« Combattre la montée de l’extrême droite au quotidien et défendre la liberté et l’indépendance de la presse ». Les mots sont lâchés lors du discours d’introduction d’Olivier Py, directeur du Théâtre du Châtelet. Tel un mot d’ordre, les artistes ont enchaîné leurs prestations sur scène. Lecture de textes de George Orwell, chants, danses, anecdotes… Chaque performance livrait un message ferme sur la situation actuelle de la presse, comme cette lecture puissante de Nicolas Mathieu qui revenait notamment sur la garde à vue de 39 heures d’Ariane Lavrilleux, journaliste à Disclose.
Les journalistes du JDD acclamés
L’un des moments forts de cet événement était indéniablement l’apparition des journalistes du Journal du Dimanche, acclamés par le public. Après être revenus sur la désormais longue grève de la rédaction, les anciens journalistes ont profité de cette « Nuit de l’indépendance » pour dévoiler une nouvelle association, créée collectivement : « Article 34 ». Ce nom fait explicitement référence à l’article éponyme de la Constitution qui définit la loi et délimite son domaine. Dans sa mise à jour de 2008, ce texte garantit « la liberté, le pluralisme et l’indépendance des médias ». Présente sur scène avec les quelques 90 ex’ du JDD, Juliette Demey, co-présidente de ce grand collectif a expliqué que cette association en cours de développement servira entre autres au « lobbying auprès de l’ensemble des politiques pour mieux protéger les journalistes ».
Plus original, le collectif a indiqué avoir créé un site, article34.org, sur lequel sera publié le lundi 16 octobre le Journal du lundi, réalisé à l’occasion de cette Nuit de l’indépendance. « Une manière pour nous de garder une trace de cet événement exceptionnel, de le partager avec ceux qui n’ont pas pu y assister et de prolonger les débats au-delà de cette Nuit particulière », précise le groupe sur le site web de l’association.
Des politiques chahutés
Pour montrer qu’il existe d’autres solutions au sein de différents médias, le streameur Jean Massiet a accueilli sur scène quatre journalistes qui appartiennent à des bureaux de SDJ (société de journalistes) qui ont un droit de vote sur le directeur de leur rédaction : Libération, le Monde, les Echos et Médiapart. Chacun d’entre eux a pu décrire son mode de fonctionnement. Aux Echos par exemple, la rédaction a rejeté le 28 septembre dernier le nom de François Vidal soumis par LVMH, leur actionnaire, afin de prendre la tête du quotidien spécialisé en économie.
Les échanges se sont un peu plus tendus lorsque trois politiques, Sophie Taille-Polian, du mouvement Génération.s, Violette Spillebout, de Renaissance et Jérémie Patrier-Leitus, de Horizons ont présenté une proposition de loi transpartisane. Ce texte propose de créer un droit d’agrément qui permet aux journalistes de voter pour la nomination d’un directeur de la rédaction.
« On a conscience que le texte arrive après la longue bataille menée par le JDD. Eux- mêmes nous l’ont dit. Mais on veut agir pour éviter que cette situation puisse se reproduire dans d’autres médias », explique Violette Spillebout. Des sifflets et des exclamations viennent perturber les échanges : « C’est honteux d’inviter Renaissance ! », s’exclame un spectateur. « À bas le 49.3 ! », lance un autre.
Cette « Nuit de l’indépendance pour une presse libre » s’est conclue par un morceau de batterie interprété par Léonie Pernet, dont le refrain « Y’en a marre ! » peut être perçu comme un message subliminal de lassitude de l’état actuel de la presse, à l’heure où s’ouvrent les États généraux de l’information.
Par Chad Akoum / ©Chad Akoum