[Par Sékou Chérif DIALLO]
La résolution du problème d’apatridie dans le monde reste un défi majeur pour le XXI e siècle. On estime actuellement à quelque 10 millions le nombre d’apatrides dans le monde.
L’auditorium du Monde, 80 boulevard Blanqui à Paris, a accueilli le lundi 29 septembre 2014 une conférence-débat sur la problématique de l’apatridie dans le monde. En présentant l’état des lieux, les défis, les causes, les conséquences mais aussi les stratégies pour éradiquer l’apatridie, les conférenciers ont mis ainsi un accent particulier sur cette question cruciale de la dignité humaine et des dispositions juridiques qui protègent cette catégorie marginale d’êtres humains.
Concernant les dispositions juridiques, il a été précisé que la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie constitue un ensemble d’instruments juridiques essentiels pour la protection des apatrides dans le monde et pour la prévention et la réduction des cas d’apatridie. Bien que complétées par des normes découlant de traités régionaux et par le droit international des Droits de l’Homme, ces deux conventions sur l’apatridie sont les seules au monde dans leur genre.
De retour de Côte d’Ivoire pays, qui compte l’une des plus importantes populations apatrides de tout le continent africain (700 000 personnes selon les estimations de HCR), Barbara Hendricks, ambassadrice de bonne volonté honoraire à vie auprès du HCR présentera de façon émouvante les témoignages des personnes apatrides rencontrées sur le terrain. Impossible pour ces personnes d’avoir des documents d’identité, de scolariser leurs enfants, de trouver du travail, d’ouvrir un compte bancaire… autant d’obstacles insoutenables qui se dressent devant ces populations qui vivent sans nationalité. Malgré la ratification en octobre 2013 par la Côte d’Ivoire des deux conventions relatives à l’apatridie, la question reste préoccupante.
L’apatridie comme une conséquence de la dissolution de certains états a été illustrée lors de cette conférence par le témoignage de Anastasia Trevogin, originaire d’Ouzbékistan, reconnue apatride en 2008 après plus de dix ans de clandestinité en France. Un récit de vie qui relate un parcours difficile et plein d’obstacles. Jusqu’à 25 ans elle n’avait qu’un acte de naissance comme seule preuve d’identité. A l’OFPRA (Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides, ndlr), les démarches relevaient d’un parcours du combattant pour justifier son apatridie, chose difficile, dans la mesure où il fallait démarcher des ambassades d’Ouzbékistan et de Russie pour qu’elles envoient un certificat prouvant qu’elle n’était pas ‘’l’une des leurs’’. Après l’obtention du statut d’apatride, Anastasia est restée pendant très longtemps cette femme qui vivait sans véritablement exister.
Les apatrides comme les réfugiés se trouvant dans une situation de précarité en rupture de lien avec leurs Etats ont tous besoin de protection. Le HCR est l’organe chargé d’aider les Etats à protéger les apatrides et à résoudre les situations d’apatridie non seulement parce que les problèmes des réfugiés et de l’apatride se recoupent parfois mais aussi parce que la protection des apatrides nécessite à maints égards une approche similaire à celle des réfugiés.
A cet effet, le HCR aide les Etats à mettre en œuvre la Convention de 1954. Elle offre des conseils techniques en matière de législation et un appui opérationnel afin de promouvoir l’instauration de procédures de détermination et de mesures visant à garantir les droits prévus dans la Convention. Malgré les multiples appels internationaux en faveur de l’adhésion des états à l’instrument juridique qu’est la Convention de 1954, très peu de pays sont actuellement parties prenantes de cet instrument (80 états à la fin de janvier 2014).