[Par Diane HAKIZIMANA]
Le pouvoir Nkurunziza semble plus que jamais décidé à en découdre avec les anciens partenaires du Burundi. Les événements du deuxième week-end d’octobre l’attestent par excellence quand jeunes et cadres affiliés au parti au pouvoir ont manifesté devant les bureaux de l’ambassade du royaume de Belgique à Bujumbura et dans d’autres coins du Burundi pour, je cite, « lancer un message aux pays européens qui soutiennent ceux qui perturbent le pays ». Cela est intervenu 24 heures après que le gouvernement burundais a demandé à Bruxelles, par le biais d’une note verbale, le remplacement de son ambassadeur en poste à Bujumbura. Bruxelles a qualifié de son côté cette décision de « geste inamical ».
Le plus visé de ces partenaires est l’ancienne colonie de la Belgique, le Burundi. Pour commencer, le pouvoir de Bujumbura retire l’agrément de l’ambassadeur de Belgique au Burundi et Bruxelles convoque l’ambassadeur du Burundi en Belgique pour une demande d’explications, c’était ce vendredi 9 octobre. Samedi 10 octobre, les principaux axes du centre-ville de Bujumbura étaient fermés par les forces de l’ordre pour couvrir les jeunes, ainsi que les cadres issus du parti au pouvoir CNDD-FDD qui manifestaient devant les bureaux de l’Union Européenne et de l’ambassade du royaume de Belgique.
Sur les affiches, on pouvait notamment lire « non au néocolonialisme ». Selon Freddy Mbonimpa, maire de la ville de Bujumbura, l’idée était de soutenir les forces de l’ordre qui ne cessent pas de ramener la paix dans le pays et dans ses missions à l’étranger. Mais surtout, de lancer un message à ces pays européens qui, selon ses dires « soutiennent ceux qui veulent perturber l’ordre dans le pays. » Avant ce passage à l’acte, Bujumbura avait tenté de renouer les relations avec ses partenaires de plus en plus réticents après les dernières élections.
Dans une plateforme d’échanges avec les membres du corps diplomatique occidental ce mercredi 7 octobre, le premier vice-président du Burundi a demandé à la communauté internationale de reconnaître les progrès réalisés par le gouvernement burundais, comme la mise en place des nouvelles institutions. Gaston Sindimwo, dans cet échange, a affirmé qu’ « en réalité, décider de suspendre la coopération avec le Burundi signifie apporter un soutien à peine voilé aux détracteurs des institutions démocratiquement élus». Sindimwo a estimé dommage le fait que le gouvernement fasse des efforts pour ramener la paix et que les pays amis du Burundi n’hésitent pas à prendre des sanctions.
Les manifestations de ce week-end traduisent-elles le mécontentement de Bujumbura ?
Ces manifestations sont une réplique à la dernière déclaration de l’Union Européenne. Cette dernière dénonçait la spirale de violence qui affecte fortement la sécurité du Burundi après la réélection du président Pierre Nkurunziza. Plusieurs cas d’assassinats, de tortures et de détentions arbitraires sont enregistrés surtout dans les quartiers de Bujumbura qui se sont investis dans les manifestations contre le troisième mandat de Nkurunziza, jugé « anticonstitutionnel » par ses opposants.
« Il est impératif que la violence cesse et qu’il soit mis fin au climat d’impunité. Cela passe par l’ouverture urgente d’un dialogue inclusif, ouvert à toutes les forces politiques et prenant en compte les initiatives régionales en cours », a rappelé la mission locale de l’UE dans cette déclaration. L’Union Européenne a assuré que les responsables de ces cas de violations des Droits de l’Homme devront répondre de leurs actes. C’est dans ce sens que 4 des officiers burundais, reconnus comme ayant pris part dans ces actes, se sont vus retirer le droit de voyager dans l’espace Schengen et leurs biens gelés par l’Union Européenne.
De surcroît, l’UE, la Belgique en tête, a récemment suspendu plusieurs de ses projets de coopération avec le Burundi en attendant l’ouverture et l’issue des négociations entre l’Union Européenne et le Burundi dans le cadre de l’article 96 de l’Accord de Cotonou. Ce dernier met au cœur du partenariat le respect de tous les Droits de l’Homme, des libertés fondamentales et des principes démocratiques.
Ces manifestations traduisent-elles donc le mécontentement de Bujumbura ? Dans tous les cas, devant la représentation diplomatique de la Belgique, un des assistants du ministre de l’Intérieur burundais a lâché : « le gouvernement soutient les 4 officiers interdits de voyage dans l’espace Schengen et il est contre le gel de leurs avoirs ». Nous demandons à l’Union Européenne de suspendre ces sanctions et que les aides promises pour le développement soient déboursées dans les plus brefs délais ! ».