Blasée, l’opinion commençait même à y voir un jeu de cache-cache, en dépit des mesures arrêtées dimanche 19, par la Zanu-Pf, parti au pouvoir, réunie en congrès extraordinaire, pour statuer sur ce cas épineux. A cette occasion, Mugabe avait été démis de ses fonctions de président du parti et son épouse, Grace, en a été exclue.
Bernique ! Le « vieux lion » ne l’entendait pas de cette oreille, faisant même semblant de montrer qu’il ne s’était rien passé d’anormal. Jusqu’à ce mercredi fatidique…
C’en est donc fini avec cet autocrate, lâché aujourd’hui par l’armée, le parti et la fameuse Organisation des anciens combattants. Cette dernière avait sa part dans cette union entre l’armée et la Zanu-PF. En fait, c’est dans cette union « sans statut » que s’organisait la légitimité du pouvoir au Zimbabwe. Et non à travers une parodie de démocratie. D’où la consigne de l’armée de ne pas faire dans la dentelle pour arriver à ses fins.
Maintenant que les jeux sont faits que va-t-il se passer, après le départ de Mugabe que souhaitaient, enfin, tous les piliers du régime ? La question essentielle est celle de savoir si l’armée ainsi que l’Organisation des anciens combattants, émanation de la lutte de l’indépendance, vont se dépouiller de leur titre de « gardien du temple » ? Et, de ce fait, laisser libre court à la naissance d’une véritable démocratie !
A s’y méprendre, il s’agit d’une destitution, presqu’à l’image de celle qui a vu, en 1987, le Tunisien Bourguiba pousser vers la porte. Sauf que l’une fut ficelée à travers un « arrangement politique », tandis que l’autre vient de se dérouler sous l’action de l’armée. Si la comparaison s’arrête-là, les conséquences pourraient être identiques, dans la mesure où c’est la même « clique » qui va reprendre les rênes du pays.
En Tunisie, Ben Ali, qui a succédé à Bourguiba, fut pire que le premier. Pour le Zimbabwe, il s’agit de Mnangangwa, vice-président de la République, un des leaders de la guérilla pour l’indépendance comme Mugabe ; il n’est pas non plus un modèle de vertu. C’est lui que la Zanu-PF vient de désigner candidat à la présidentielle de 2018, et il en sera sans doute vainqueur devant une opposition mise en lambeaux par le mari de Grace.
Il y a encore-là l’image de l’Afrique du Sud de l’après-Mandela, le lettré, qui a su donner de l’éclat à son mandat, aujourd’hui éclaboussé par Zuma, son deuxième successeur, celui-ci n’ayant eu d’autres mérites que celui d’avoir été combattant pour la lutte contre l’apartheid. C’est le scénario en cours au Zimbabwe, où le président limogé est un homme instruit. Avec, malgré tout, un bagage de sept diplômes académiques, contre non seulement un vide intellectuel, mais aussi un dictateur potentiel. Par rapport aux nombreux actes « inciviques » qu’il a posés pendant sa longue carrière politique, d’abord, en tant que ministre.
A tout prendre, il y a lieu de penser que le premier cycle de la situation politique, au Zimbabwe, vient d’être bouclé. Quoi que déchirée, l’opposition ne manquera pas de faire en sorte qu’un nouveau s’ouvre, démocratique, porteur d’espoir pour tous.